30.01
2015 Activités

Cet hiver, c’est décidé, vous vous mettez au freestyle ! Mais avant de prendre la direction du half-pipe ou du big air les plus proches, quelques petites choses à savoir sur cette discipline en vogue, avec Guillaume Desmurs. Journaliste, éditeur, photographe, il a signé dernièrement aux Editions Inverse qu'il a fondées, « This is real skiing », un ouvrage de référence sur le freestyle.

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France Montagnes : Le freestyle s’adresse-t-il uniquement aux ados et jeunes adultes ?

Guillaume Desmurs : D’un point de vue technique, faire un 360 degrés ou glisser sur une petite box dans un snowpark est à la portée d’un grand nombre de skieurs, à n’importe quel âge ou presque. Cela dit, le freestyle s’est toujours pratiqué en groupe, source d'émulation majeure dans la discipline, et gage de progression. Mais, cela suppose une certaine prise de risque et d'oser se jeter en l’air. Alors forcément, la chute fait partie du jeu. Or à 30 ou 40 ans, on n’est plus forcément dans cette logique là. C’est pourquoi on peut dire que le freestyle s’adresse quand même principalement aux jeunes.

France Montagne : Le freestyle regroupe une multitude de spécialités. Laquelle choisir ?

GD : La discipline la plus accessible est sans doute le slopestyle, qui consiste à enchaîner des figures sur différents modules (bosses, rails, boxes…). C’est ce qu’on fait naturellement dans un snowpark, où l’on retrouve des modules de tous niveaux. Le half-pipe est déjà beaucoup plus engagé : s’élancer sur des murs glacés de six mètres de haut n’est pas à la portée de tout le monde ! Le freestyle backcountry (aller sauter des obstacles dans une descente en hors-piste) demande une certaine connaissance de la montagne, notamment pour ne pas risquer de se retrouver pris dans une avalanche. Il faut donc déjà pas mal de pratique du ski en général. A l’inverse, tout ce qui est « jib urbain » - consistant à faire des figures sur du mobilier qu’on trouve en ville, comme des mains courantes d’escalier – peut être pratiqué partout et n’importe quand. On n’est pas dépendant des conditions météo, et c’est facile d’accès. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si cette spécialité est la plus répandue dans les vidéos actuelles de ski freestyle.

France Montagnes : Comment s’y retrouver dans les nombreuses figures, que les initiés appellent tricks ?

GD : Les figures de base, qui ne nécessitent pas un entraînement trop intense, sont le 360 degrés, c'est à dire un tour sur soi-même, les sauts droits avec des grabs, qui consistent à attraper ses skis avec la main, et des backflips ou frontflips, sauts périlleux arrière et avant. En compétition de slopestyle ou de half-pipe, les riders effectuent sur presque tous leurs sauts des corks, autrement dit une rotation désaxée, vrillée. Les juges regardent le nombre de tours que font les skieurs avant ou après avoir glissé sur les rails. On parle par exemple de 3-6 in si le skieur fait un tour – un 360 degrés ou « 3-6 » - avant de glisser. Dans le half-pipe, il faut être attentif au sens de rotation. N’importe quel rider a un sens de rotation préféré qu’on appelle natural. Mais pour que sa descente soit technique et donc mieux notée par les juges, il doit aussi intégrer des rotations dans son mauvais sens (unnatural). L’amplitude et la hauteur des sauts sont également de bons indicateurs de la technicité d’un run dans le half-pipe. Idem en slopestyle.

France Montagnes : Le freestyle a beaucoup évolué depuis sa naissance, dans les années 1970… Quelles sont les grandes étapes ?

GD : Le freestyle est dans l’ADN du ski. C’est tout simplement une façon de s’amuser sur les skis. Sondre Norheim, l’inventeur du télémark, sautait déjà des bosses, tout comme Emile Allais. Dans des vieux films des années 1930, on peut même voir des skis à double spatule ! Mais il est vrai que le freestyle tel qu’on l’entend aujourd’hui a véritablement pris son essor aux Etats-Unis, dans les années 1970. C’était l’époque du « hot dog », qui regroupait le ski de bosses, le ballet et le saut acrobatique. Il y avait énormément de créativité , d’inventivité. Puis ces disciplines se sont « normalisées » en rentrant dans le giron de la Fédération internationale de ski. Du coup, au milieu des années 1990, des skieurs de bosses – en particulier les Québécois et les Français – frustrés par l’évolution de leur discipline, ont inventé le freestyle « New School ». Il était pratiqué par des skieurs très forts techniquement, mais surtout épris de liberté. Ils se sont beaucoup inspirés du snowboard. Ils étaient très polyvalents, capables de briller aussi bien en big air, qu’en slopestyle ou en half-pipe à l’image d’un Candide Thovex  de La Clusaz. Dans les années 2000, les figures sont devenues de plus en plus complexes, et les skieurs se sont spécialisés dans une discipline, à de très rares exceptions près. Enfin, la dernière étape, c’est l’entrée du half-pipe et du slopestyle aux JO en 2014.

France Montagnes : Est-ce la consécration pour le freestyle ?

GD : C’est à la fois une victoire car ce sport devient officiel, mais c'est aussi la fin de cycle. A l’image du ski de bosses à la fin des années 1990, le half-pipe ou le slopestyle pourraient être étouffés par le carcan fédéral, perdre la créativité des débuts. Mais il est certain que les jeunes inventeront autre chose. Le freestyle actuel, dit « new school », connaîtra certainement une mutation.

©Actumontagne pour France Montagnes

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