Mise à jour le 28.02
2024 Nature et découverte

Karen est pisteuse secouriste à la station des Arcs depuis de nombreuses années, et c’est toujours avec la même passion pour la montagne que chaque jour, elle assure la sécurité et le secours aux skieurs du domaine.

Elle nous fait ainsi découvrir un métier crucial pour la sécurité en montagne, allant de la préparation des pistes à la prise en charge des blessés en cas d’accident.

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     Karen Gilliot - Pisteur secouriste artificier aux Arcs.

Raconte-nous ton job, c'est quoi ta mission dans le monde de la montagne ? 

Ma mission dans le monde de la montagne, mon job, c'est la prévention, l’information aux clients, le secours quand c’est nécessaire, et la prévention par déclenchement d'avalanche. 

Je suis pisteur-artificier. Qu’est-ce qu’un artificier ? C'est quelqu'un qui fait les PIDA, c’est-à-dire les Plan d'Intervention de Déclenchement des Avalanches.

Et pourquoi on fait ça ? Tout simplement pour que vous les skieurs, vous puissiez être en sécurité sur les pistes. On jette les explosifs dans la neige pour casser la couche fragile dans le manteau neigeux, et ça sert à garder le domaine skiable en sécurité, en diminuant le risque d'avalanche sur les pistes damées. 

 

Comment fait-on pour devenir Pisteur secouriste ? 

 

Pour devenir pisteur secouriste, il faut d’abord passer 2 tests de ski. Le premier est la flèche de vermeil, puis vous pouvez ensuite passer le test technique. C'est un test de ski qui est hors-piste, avec un jury de collègues pisteurs, qui va juger ton engagement, ton choix de ligne, si tu descends en sécurité, si tu as une bonne silhouette, un bon changement de rythme etc.

Si tu as une note minimale de 12/20 au test technique, que tu es majeur, et que tu as le PSE1-PSE2 (premiers secours niveau 1 et 2), tu peux présenter le premier degré.

La première partie du 1er degré, c'est le test CGMM (Connaissances Générales du Milieu de la Montagne), c'est un examen QCM qui est éliminatoire. Après ça, il y a des examens plus spécifiques, comme les descentes en traineaux, les descentes en barquette, le balisage, le jalonnage, les réglementations, les niveaux, la météo, etc. A la fin, il y a un examen de tous ces éléments, et si tu valides chaque élément, tu es pisteur secouriste 1er degré !

 

Quelles sont les spécialités pour compléter la formation ? 

 

Après avoir passé le 1er degré et après quelques saisons, vous pouvez passer le 2ème degré, 3ème degré, maître pisteur, maître-chien, artificier, avalancheur, formateur de secourisme, etc. Il y a plein de possibilités !

 

Est-ce que c'est un métier dangereux ? 

 

Le danger n'est jamais à zéro, donc oui c'est un travail qui est parfois risqué, mais on essaye de gérer le risque et d’avoir les bons gestes dans le risque, pour ne pas nous mettre en danger. 

 

C'est quoi la journée type d'un pisteur ? 

 

Ce qui est bien c’est que ce n'est pas monotone ! Une journée peut changer par rapport à ce qu'il se passe dans la station ou selon la période de l'année.

Mais en général, on arrive tous au local, on a un debrief avec nos chefs pour savoir ce qu'il faut faire dans la journée, les missions spécifiques, etc.

Après, on part tous pour ouvrir les pistes. On regarde si le damage a bien été fait, si le jallonage est en place, les balisages, les filets de protection, ou encore les banderoles "Slow / Ralentir" par exemple.

Après ça, on est à tour de rôle dans les postes de secours, il y a souvent des pisteurs qui restent au sommet, comme ça s’il y a un secours, ils n’ont que de la descente à faire avec les traineaux. Le reste fait des patrouilles, va voir les pentes, la neige, fait l'accueil clientèle, donne des informations, etc. 

 

Comment savez-vous si une piste doit être ouverte ou non ? 

 

Cela va dépendre si le damage a été bien fait, de la période de l'année, etc. Par exemple au printemps, il fait très froid la nuit, très chaud la journée, du coup la neige devient très dure, donc on peut décaler l'ouverture pour que la neige devienne plus skiable.

Ça marche aussi pour les risques d'avalanche, on peut fermer une piste parce qu’il y a trop de risques sur ce qui est au-dessus de la piste.

 

Combien d'intervention vous faites en moyenne sur une journée ?  

 

Cela va dépendre vraiment de la période, si c'est hors vacances ou pendant les vacances. Ici on fait environ 2000-2500 secours par hiver. 

Le principal aspect de notre travail, c'est la prévention. Sur les pistes, il y a beaucoup de jalons par exemple les jalons de droites sont rouge et orange en haut, et rouge entier pour ceux de gauche. Les balises avec les numéros sont mises en place aussi pour aider les clients depuis où ils se situent exactement sur les pistes. On a aussi les matelas, les filets, les banderoles, et toute cette prévention nous aide à avoir moins d'accident en permettant à nos clients de skier tout en sécurité. 

 

Tu préfères la barquette ou le traineau pour la descente d'un blessé ? 

 

J'aime les 2 ! Le traineau c'est sympa car tu es tout seul, et la barquette, quand tu l’utilise tu sais que tu vas en hors-piste, et on aime bien ça. 

 

Et en dehors des secours, que faites-vous ? 

 

En dehors du secours j'ai beaucoup de travail. L’ouverture des pistes déjà prend beaucoup de temps, et souvent avec la neige, il faut ranger le matériel, voir si les matelas sont à la bonne hauteur, si ça protège bien.

Ensuite il y a la relation client, les clients peuvent passer nous voir pour prendre des informations ou poser des questions, on est là pour ça. Nos postes sont ouverts, et c'est vraiment important, si vous ne comprenez pas quelque chose sur tout ce qu'il s'est passé au niveau du manteau neigeux, ou du damage, on est vraiment là pour donner des informations avec les connaissances que l'on a. 

 

Que faut-il faire quand on est témoin d’un accident ? 

 

Si on est témoin d'un accident sur les pistes, il faut se protéger, mettre les skis en croix en amont de la victime, puis appeler le service des pistes ou le 112 (si vous êtes hors-pistes).

Le plus important c'est de dire ou vous êtes (il y a les balises sur les pistes avec les numéros et les noms de pistes), et donner le plus de détails sur ce qu’il s’est passé, quelle est la nature de la blessure de la personne.

Ensuite, on arrive avec le matériel nécessaire pour faire le bilan de la personne et l’évacuer dans le centre médical ou autres.

Quand on est appelé, on va en secours sur ski, on part avec le traineau si c'est sur piste, et si c'est hors-piste on part avec une barquette à 2.

Le temps pour arriver sur place dépend vraiment du type de neige, du lieu, de la distance, de s’il y a beaucoup de monde sur les pistes, parce qu'il faut faire attention aussi que les gens ne nous percutent pas et qu’on ne percute pas les gens.

Du coup, il faut avoir un très bon niveau de ski en tout type de neige pour se déplacer voir les victimes, pour se déplacer avec les barquettes et traineaux, et pour se déplacer pour les déclenchements préventifs des avalanches.

 

Un petit conseil pour un séjour agréable sur les pistes ? Tu nous rappelles les règles de sécurité ? 

 

LA règle de sécurité que je peux donner aux clients c'est avant tout de penser que vous n'êtes pas tout seul, il y a des gens partout sur les pistes, et il faut regarder autour de vous quand vous vous engagé, afin de pas percuter les gens.

 

Une anecdote de boulot à nous partager ?  

 

Le secours qui m'a marqué le plus cet hiver, c'était une avalanche en début de saison. Nous étions 4 pisteurs à monter sur place, pour secourir 1 victime sous la neige. Ce qui m'a marqué c’est que ses collègues, ses copains qui était avec lui ce jour-là savaient vraiment utiliser le matériel de DVA, pelle et sonde. Ils ont dégagé la victime eux-mêmes, et nous en arrivant elle était inconsciente. Après avoir fait notre bilan, mis sous oxygène etc., il est redevenu conscient, il nous parlait. Finalement il n'avait pas de blessure du tout, et ça c'est bien fini grâce à ses copains qui savaient faire ! 

 

Et le reste de l'année, tu fais quoi ? 

 

Dans mon temps libre je fais beaucoup de montagne, ça me fait plaisir. En hiver le ski, le ski de fond, les cascades de glace et le ski de randonnée, et l'été j'aime bien pratiquer l'escalade, de la marche en montagne, je cours aussi beaucoup en montagne.

Et comme travail parce qu'il faut travailler, je suis formateur de secourisme. Je forme les gens aux premiers secours en équipe niveau 1 et niveau 2, et je suis aussi secouriste sur des événements sportifs en montagne comme les courses de VTT, les trails etc.

Je suis arrivée en France en 2010, j'ai passé mes hivers ici, et mes étés en Amérique du Sud dans les autres domaines skiables pour travailler. Je suis toujours revenue en France parce que je me sens vraiment bien ici, on est libre, on a des grands espaces, il y a vraiment une jolie culture du ski qui me plait beaucoup, et regardez les belles vues qu'on a ici, c'est difficile de partir !

J'ai beaucoup de chance, j'ai un métier qui est avant tout une passion, je ne pourrai pas travailler à l'intérieur. Mon cadre de travail n'est pas monotone et change tous les jours, je suis vraiment ravie d'être pisteur secouriste, je ne pourrais pas faire autre chose. 

 

En quoi la montagne ça te gagne ? 

 

La Montagne ça me gagne, parce que c'est quelque chose qui me passionne dans mon travail et dans mon temps libre. Ça me permet de vivre beaucoup de choses que je peux partager avec ma famille ou avec mes collègues au travail, c'est juste un endroit où j'ai envie d'être tout le temps. 

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Retrouvez l'interview vidéo de Karen sur nos réseaux sociaux, ou en cliquant ici

 

Crédit photo bannière : Les Arcs - ©Juliette Rebour

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